On cuisinait beaucoup de boulettes différentes à la maison. Les albondigas.
Vois trouverez plusieurs recettes sur ce blog.
Et souvent, quand on disait boulettes on disait sandwich aux boulettes.
SANDWICH BOULETTES, souvenir d’enfance.
Le meuble de cuisine, rudimentaire, est en Formica. Tout comme la table, les chaises, le meuble ou l’on range assiettes, verres et couverts.
La lumière, vaporeuse à cause des rideaux que ma tante a cousu dans un tissu brodé, vient en oblique, de la rue. La rue fraîchement goudronnée, chuinte au passage des rares voitures qui filent vers la cité bâtie spécialement pour accueillir les pieds noirs débarqués de Port-Vendres.
Je suis appuyé contre le panneau en Formica, pied droit derrière le pied gauche, jambe fléchie. Je regarde vers le haut ma mère qui s’active.
Un parfum de sauce au vin, d’ail et d’oignon frits flotte, et provoque en moi toujours les mêmes sensations. L’eau à la bouche, frissons, impatience…
De la vapeur monte de la vieille cocotte en fonte, rouge, immuable, dont je ne perçois pourtant que le haut.
J’entends ma mère saisir le pain que je suis allé chercher ce matin à la boulangerie du Vernet. La croûte craque sous les doigts de maman. Elle coupe un quignon, sur une quinzaine de centimètres. Le bruit des dents du couteau qui attaquent la croûte provoque en moi un indescriptible ravissement.
De ses doigts déjà déformés par l’arthrite, elle creuse le quignon pour ôter la mie. Aussitôt elle la mange après l’avoir légèrement trempée dans la sauce. Ma mère adore le pain.
Elle a fait des boulettes. Albondigas. Avec du veau et du porc. Des olives, des champignons, des rondelles de carottes, de l’ail et de l’oignon et de la tomate, dans une sauce au vin blanc, lentement réduite.
Après avoir créé ce que j’appelais un puits dans le pain, Carmen, ma mère, coupe une boulette en quatre. Elle dispose les morceaux dans le pain, puis, avec une cuillère, elle verse de la sauce et nappe les boulettes. La sauce est lisse, luisante, rougeâtre et onctueuse.
C’est un moment suspendu. Jusque-là elle ne m’a pas regardé. Et moi je ne voyais d’elle que sa robe à motifs simples et son tablier par-dessus. Sa chaleur.
Son odeur. Sa vibration. Son amour.
Elle se tourne vers moi et se penche. Sourire.
- ten cariño
Et elle me tend le sandwich
- i no te manches he !
Je vais faire attention à ne pas faire couler de sauce sur ma chemise propre.
Le sandwich est croustillant autour, moelleux et juteux dedans. Les boulettes sont tendres, goûteuses, riches.
La première bouchée est fantastique mais je sais que le meilleur moment sera quand il ne restera que le bout du bout du quignon.
Je suis assis à la table de la cuisine. Dans une bulle. Ailleurs. Dans un bonheur concret, prosaïque, unique et égoïste.
Je me fabrique sans le savoir des souvenirs.
Un jour, plus tard, bien plus tard, je lirai Proust, et je me dirai que mes boulettes valent bien sa madeleine.
INGRÉDIENTS (pour 4 personnes) :
Pour la farce :
· 800 g de viande de veau hachée
· 1 CAS de pignons
· 1 œuf
· 6 olives vertes
· Quelques feuilles de persil
· 1 tranche de pain de mie
· 1 CAS de poudre d’amandes
· ½ verre de lait
· 1 CAS de chapelure
· Sel et poivre
· Farine
· 2 CAS de graisse de canard
Pour la sauce :
· 3 échalotes finement hachées
· 12 olives vertes
· 12 champignons de Paris
· 8 lardons
· 2 grains d’ail
· 1 feuille de laurier
· 2 CAS de moutarde fine
· 2 verres de vin blanc
· 1 litre de fond de veau
· 1 CAS de crème fraîche
· 1 CAS de maïzena
· 1 CAC de paprika
· 1 CAC de curcuma
· Sel et poivre
· Quelques brins de ciboulette
PRÉPARATION :
Préparer la farce :
· Dans un bol, faire tremper la tranche de pain de mie dans le lait. Bien mélanger pour obtenir une pâte
· Hacher quelques feuilles de persil
· Couper les olives en morceaux
· Dans un cul de poule mettre tous les ingrédients et bien les malaxer à la main.
· Après avoir mouillé vos mains, malaxer les boulettes (pas trop grosses) et les fariner.
· Les réserver
CUISSON :
· Dans un faitout faire chauffer la graisse de canard
· Faire dorer les boulettes dans la graisse de canard à feu moyen et les réserver
· Faire colorer légèrement les lardons
· Dans les sucs de cuisson, faire revenir l’échalote hachée et les grains d’ail pelés
· Rajouter un demi-verre d’eau et finir de faire suer
· Rajouter la feuille de laurier
· Rajouter les épices, saler et poivrer
· Couper les champignons en deux et rincer les olives. Les rajouter dans le faitout
· Laisser cuire deux minutes puis rajouter la maïzena. Bien remuer
· Rajouter délicatement les boulettes et remuer doucement
· Rajouter le vin blanc et laisser évaporer l’alcool en remuant bien
· Rajouter la moutarde, mélanger et laisser cuire deux minutes
· Rajouter le fond de veau, cuire à couvert 20 minutes
· Découvrir et laisser réduire 20 minutes de plus
· Avant de servir, rajouter la crème fraîche et bien remuer. Rectifier l’assaisonnement si besoin.
· Décorer avec un peu de ciboulette hachée, puis servir avec du riz blanc ou de la purée de pommes de terre.
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